Talents

Focus sur le métier de curateur

Le métier de curateur existe dans le monde de l’art mais aussi dans la sphère du web et de la communication.

Le 6 mars 2017

es confettis-revue-curateur-article

Le métier de curateur existe dans le monde de l’art mais aussi dans la sphère du web et de la communication. Le curateur est ouvert à 360° sur le monde. Au plus près des artistes et au carrefour entre les différents intervenants, il repousse les frontières et redynamise la façon de concevoir expositions, évènements ou contenus éditoriaux. Dans le Volume 2 de la revue Les Confettis, nous détaillons ce métier peu connu. découvrez ce métier à travers les témoignages de nos experts du curating.

Jérôme GlicensteinJérôme Glicenstein est professeur au département Arts plastiques de l’Université Paris 8 et auteur de L’invention du curateur. Mutations dans l’art contemporain (PUF, 2015)

Jérôme, comment décririez-vous le métier de curateur d’art ?
La maîtrise de l’information est la principale fonction du métier. Les curateurs qui réussissent sont les plus informés. Ils vont d’expositions en expositions, regardent les sites des artistes. Ils sont à la recherche de la tendance à paraître, cherchent le concept ou style novateur. Ils sont associés à la scène émergente. Ils fréquentent les écoles d’art, les résidences, les collectifs d’artistes.

Pour vous, le curateur est-il un auteur ?
Le curateur ne réalise pas les œuvres mais il leur donne une identité. Il est un interprète. Au cinéma, l’importance du chef opérateur ou de l’acteur est acquise alors que l’on regarde souvent le curateur avec dédain, comme quelqu’un qui empêcherait l’accès à l’art, or c’est l’inverse. On a besoin de sa médiation, de son interprétation, comme pour un morceau de musique, une partition qui serait joué par un musicien. Son interprétation d’une oeuvre n’est jamais neutre.

Quelles sont les qualités essentielles du curateur d’art ?
Le curateur d’art doit faire des choix successifs en terme de médiation et de scénographie. Par exemple, si un artiste a fait dix œuvres, est-ce qu’on les expose toutes, une seule ou on en commande une spécialement pour l’événement ? Il s’agit d’une suite de choix liés aux artistes, aux œuvres et à l’espace d’exposition. Finalement, l’objectif du métier est de gérer les relations, d’être au coeur de l’organisation, d’avoir une position centrale.

les confettis-illustration-curateur-art
Donnia Ghezlane-Lala
Donnia Ghezlane-Lala est rédactrice en chef de Cheese (la nouvelle verticale dédiée à la photo de Konbini) et ancienne curatrice digitale chez Fubiz

Donnia, qu’est-ce que le métier de curateur digital ?
C’est comme un commissaire d’exposition qui va chercher des œuvres et des artistes pour les encadrer et les exposer dans des galeries, sauf que lui, est à la recherche de contenus sur un tout autre terrain : Internet. Il va chercher à reconnaitre les tendances du moment et à venir.

Quelles sont ses principales missions ?
A l’époque où je travaillais chez Fubiz à ce titre, je faisais de la veille intensive, constante, je creusais, recherchais des contenus et ensuite, je les analysais. Mon domaine d’exploration était le champ artistique. C’est un nouveau métier, il est encore impossible d’esquisser les missions et de figer les contours. Il est amené à évoluer.

Qu’est-ce que l’essor du curateur digital a changé aux fonctionnements des entreprises ?
J’imagine que les entreprises se tiennent davantage au courant des dernières tendances qu’avant et qu’elles sont plus en cohésion avec l’actualité grâce à la présence d’un curateur.

Quelle a été votre dernière commande ? Votre dernier projet ?
Travaillant dans un média, mes commandes, c’était tous les jours et pour une audience ciblée : nourrir un site, de temps en temps essayer de montrer à un public ce qu’il n’a jamais vu ailleurs. Quand j’avais affaire à un annonceur, je devais le conseiller et lui proposer des artistes avec qui collaborer, des idées d’événements offline ou online à réaliser.

Le curateur digital est-il un auteur ?
Un très bel exemple de ce qu’est le curating sur Internet est la plate-forme Avant Arte ou encore le site de Vjeranski consacré à l’art. Pas besoin de médiation, c’est comme visiter une galerie. Concis, direct mais il doit parler des techniques et faire découvrir des projets artistiques. Aujourd’hui, en tant que rédactrice en chef chez Cheese (verticale de Konbini dédiée à la photographie), je me considère encore comme une curatrice. Au quotidien, je mets en avant de nouveaux talents, que cela soit le portfolio d’un amateur ou bien du côté des plus grands et de l’actualité. Sur mon Tumblr, je réunis ce qui me touche. C’est un moyen d’expression par l’image. En ce sens, le curateur est un auteur.

Comment sélectionnez-vous les informations sur le net ?
Dans un média, il y a une ligne éditoriale, mais je fonctionne au coup de coeur, sans rien m’interdire. Dans le domaine de l’art, excepté les grandes nouvelles et les expositions/événements, il y a souvent du contenu froid. Ensuite, il faut déceler ce qui fonctionne auprès de son audience et apprendre de ses erreurs (rires). Parfois, on met en avant un projet auquel on croit et c’est un échec ! Soit parce que la Toile est occupée par autre chose soit parce que c’était un sujet « niche ». Il faut rebondir sur l’actualité, c’est primordial.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui serait intéressé par ce métier ?
Il faut être curieux, connecté, chiner comme un brocanteur à la recherche de meubles rares et précieux, tenir un blog ou un média consacré à ce qui nous touche et savoir sortir de son écran, restez en mouvement.

les confettis-curateur-illustration

Elodie FaganElodie Fagan est la directrice marketing de Pinterest en France

Elodie, qu’est-ce que le métier de curateur digital pour vous ?
Être un curateur digital, c’est créer de l’engagement en sélectionnant et organisant le contenu de sa marque. Chez Pinterest, qui est un catalogue d’idées, nous voulons inspirer chaque utilisateur et les aider à réaliser leurs envies.

Quelles sont ses principales missions ?
Il identifie les tendances et les meilleurs créateurs du contenus en lien avec cette mode.

Qu’est-ce que l’essor du curateur digital a changé aux fonctionnements des entreprises ?
Avant, on avait les campagnes de pub type spots publicitaires TV, affichage, radio, et aujourd’hui, grâce au curateur digital, community manager, brand content manager, l’entreprise se raconte d’une nouvelle manière, plus proche et personnalisée.

Comment sélectionnez-vous les informations sur le net ?
Je ne suis pas experte mais disons qu’il faut prendre en compte des critères aussi bien émotionnels qu’intellectuels. L’information doit être pertinente, unique, récurrente, authentique et fiable.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui serait intéressé par ce métier ?
Imprégnez-vous de l’époque, soyez curieux, lisez, ne restez pas passif face à ce que vous voyez. Faites-vous un avis, suivez les personnes qui vous inspirent et analysez la manière dont elles créent leur influence. Tenez-vous au courant des évolutions du digital.

Et quel futur imaginez-vous dans ce domaine ?
Internet ne va pas s’appauvrir de contenus avec le temps et les médias traditionnels vont perdre en audience, devenir moins intéressant pour les marques. Tout va migrer vers le digital. On imaginera de plus en plus d’expériences uniques pour les utilisateurs. Je pense à des expériences en réalité augmentée, d’immersion et de gaming.

Retrouvez ce sujet dans son intégralité dans Les Confettis Volume 2
Illustrations © Tinymorningsketch