Rencontre avec Yodelice
Dans ces précédents albums, il se présentait en hobo rêveur parcourant la Californie ou l’Andalousie avec sa guitare à l’image
Dans ces précédents albums, il se présentait en hobo rêveur parcourant la Californie ou l’Andalousie avec sa guitare à l’image du titre qui l’a révélé : Sunday with a Flu. Il est de retour avec un troisième album Square Eyes. Même si celui ci est toujours emprunt de folk, ce nouvel opus sonne résolument plus rock. Plus énergique et plus urbain, Yodelice nous livre des chansons fortes comme les titres Time ou Fade away ou Another Second, mon coup de cœur. Cet album, confirme une fois de plus son talent et je vous conseille de ne pas vous limiter à une seule écoute car l’artiste continue de surprendre. Mais place à Yodelice lui même, pour nous parler de son album.
Perrine : Bonjour Maxim. Lors de tes précédents albums, on avait laissé ton personnage de « hobo » avec sa guitare, que lui est-il arrivé depuis ? Yodelice : Il est toujours avec une guitare, mais elle est électrique maintenant :) Mais je ne sais pas si j’ai jamais vraiment été un hobo très honnêtement. Même si j’adore voyager et m’inspirer de mes voyages, je suis quand même quelqu’un d’extrêmement casanier et pépère en fait… Pourtant, Yodelice dégage une certaine image du voyage, on avait la sensation d’avoir laissé ton personnage en Californie et on le retrouve maintenant plutôt dans le New-York des 70’s, non ? Yodelice : C’est marrant parce que j’ai enregistré les 2 premiers albums en Californie et là j’ai effectivement passé 2 ans entre New-York et Paris. Du coup, je me rends compte que je suis très sensible et très inspiré par les éléments qui m’entourent, par le projet Holographic auquel je participe par exemple. Et New-York m’a inspiré quelque chose d’autre, une autre énergie. Il y a aussi eu cette rencontre avec la troupe de théâtre des Moustache Brothers… Yodelice : Alors ça s’est passé bien avant que je ne pense à refaire un album. Après 4 longues années de tournées, j’ai fait un voyage en Birmanie. J’avais soutenu une manifestation pour Aung San Suu Kyi qui était assignée à domicile à l’époque et je voulais visiter ce pays, voir où en était la situation politique. J’ai parcouru à peu près tout le pays en sac à dos et je me suis arrêté à Mandalé où j’avais entendu parler des Moustache Brothers. J’avais appris qu’ils avaient fait de la prison à cause de leurs satires sur le gouvernement et qu’ils donnaient des représentations dans le garage de leur maison car ils n’avaient pas le droit de se produire dans des lieux publics. Je les ai trouvés inspirants, très drôles, ils parlent de leur situation avec beaucoup de recul. Ça remet en place le sens même d’être un artiste, d’avoir des choses à raconter. Et eux pour le coup ils ont des choses à dire, ils dénoncent la corruption, le trafic de drogues et de femmes. De faire ça sur le ton de l’humour et en risquant leur peau, car ils sont très surveillés, ça a déclenché quelque chose en moi. Cette rencontre m’a d’ailleurs inspiré la chanson Time. De quoi parle Square Eyes, ton nouvel album justement ?
Yodelice : C’est la fin d’une relation qui part en Big Bang total, avec cette phase qui suit avec les doutes qu’on traverse puis la phase où tout se remet en route, où une nouvelle lueur d’espoir apparaît.
Square Eyes sonne moins folk, il a une énergie résolument plus rock que dans les albums précédents, comment tu l’expliques ? Yodelice : Ça doit venir de la scène. Je suis guitariste, j’ai toujours écouté du rock, ça fait partie de ma culture musicale de base. J’ai commencé la guitare en écoutant du Jimi Hendrix, du Led Zeppelin, etc. Le rock, surtout celui des années 70, m’habite depuis toujours. Et c’est marrant parce que mon premier album a été accueilli comme un album folk alors que moi j’avais la sensation d’avoir réalisé un disque organique. Comme j’avais un parcours de technicien de l’industrie musicale, que j’avais travaillé sur des gros disques de variétés, j’avais envie que ma proposition artistique me ressemble. J’écris mes chansons avec une guitare acoustique, je suis tout le temps avec une guitare et j’avais envie de faire un premier disque épuré. Mais il est sorti à un moment marqué par le retour des singer-songwriters et on m’a classé dans la mouvance folk.
Après, pour « Square Eyes », j’ai toujours électrifié mes morceaux sur scène donc je ne pense pas que le public de Yodelice soit déstabilisé par ce côté rock.
Pas du tout ! Mais on a la sensation d’un album plus chaleureux, avec plus de couleurs…
Yodelice : C’est une évolution du personnage et en même temps une évolution personnelle puisque c’est finalement ma vie qui inspire les chansons et l’univers de Yodelice. C’est très important pour moi d’être en symbiose, que ce personnage que j’ai créé pour m’offrir une liberté artistique ne devienne pas une prison. Et ce n’est pas si évident que ça au final.
J’ai instauré des codes et j’ai parfois eu le sentiment que je ne pouvais pas en sortir. Mais c’est ridicule car ce personnage c’est moi, je peux en faire ce que je veux.
Et vers quoi se dirige Yodelice ?
Yodelice : Il a la quête de devenir un homme, d’essayer de devenir quelqu’un de bien ou du mieux qu’il peut, ce que tout le monde recherche après tout. Yodelice, que ce soit dans les textes ou les étapes traversées, ça correspond à des périodes de ma vie qui sont très différentes mais qui sont le parcours d’un homme. Je ne donne pas de leçons, c’est ma vie, mes mélancolies, mes blessures, mes choix et tout ce dont j’ai envie de parler.
Pourquoi avoir intitulé l’album Square Eyes ?
Yodelice : Ça vient de mes délires entre le son et l’image ! C’est une expression américaine que les mères disent à leurs enfants qui restent scotchés devant la télé : si tu regardes trop la télé, tu vas finir par avoir des « square eyes », les yeux carrés quoi ! Mais c’est une expression qui ne se traduit pas, on n’a pas d’équivalent ici. On a la branlette qui rend sourd mais pas les yeux carrés :) J’ai trouvé ce terme hyper inspirant en terme graphique, la première fois que je l’ai entendu, j’ai tout de suite vu des mini-écrans, des yeux carrés. Et je n’ai pas choisi ce nom par rapport au thème du disque mais par rapport à la manière dont il a été produit. J’ai passé beaucoup de temps sur la production et je trouve que l’album a un côté très graphique. Square Eyes ça collait bien avec ça…
L’interview s’est déroulé dans le fumoir caché du restaurant le Derrière. L’ambiance du lieu collait parfaitement à l’univers de Yodelice. Un savant mélange d’objets à la fois anciens et rétros, le tout dans un cadre de salon hors temps. C’était chouette de s’évader un moment avec lui. Et je vous conseille cet endroit mais vous n’aurez pas la chance d’être aussi bien accompagnée que moi ce jour là ;)
Merci à Maxime pour cette rencontre. On a bien ri et on a même jeté des confettis ;) Merci aussi à Armonie de armonielovesmusic.com
Square Eyes dans les bacs et Yodelice en tournée du 6 novembre au 31 janvier (20, 21 et 22 à la Cigale à Paris)
À suivre
As Animals, la claque