Sarah Sauquet, une romance avec la littérature
Professeur de littérature, Sarah Sauquet est aussi la créatrice de l’application Un texte Un jour. Un nouveau genre de biblio-tech principalement à destination des ados car Sarah en est convaincue, les belles lettres peuvent dissiper le mal-être.
On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans. Tellement pas sérieux que la lecture des grands classiques de la littérature n’est pas au sommaire. Sarah Sauquet, professeur de lettres au sein de l’établissement Charles-de-Foucauld dans le 18ème arrondissement parisien ne s’étonne guère de cette nouvelle : « Aujourd’hui, il suffit de taper trois mots dans un moteur de recherches pour qu’une quantité d’informations apparaisse sur notre écran. Comment voulez- vous insuffler le goût de l’effort et de la lenteur, inhérents au travail et à la lecture ? Comment demander aux élèves d’avoir une heure d’attention pleine quand j’ai moi-même du mal à éteindre mon portable ? »
Certains diraient « bonjour tristesse ! » devant ce constat mais pas Sarah qui, aidée de sa mère ingénieure et créatrice d’applications, va lancer l’appli Un texte Un jour sur mobiles et tablettes en 2012. Le concept est simple, efficace et gratuit : un texte d’une quinzaine de lignes d’un auteur français « classique », un quizz pour tester sa récente lecture et une biographie de l’auteur pour contextualiser. Le succès n’est pas posthume, désolé Edgar Allan Poe. Un texte Un jour est la seconde application la plus téléchargée dans la rubrique Littératurede l’App Store. Mère et fille ne s’arrêteront pas en si bon chemin et créeront entre 2012 et 2014 les applications : Un Poème Un Jour, A text A day et Un Texte Un Eros. « Moi qui savais à peine envoyer une pièce jointe en 2011, j’ai appris sur le tas à utiliser les réseaux sociaux, j’ai eu la chance de faire de nombreuses conférences (notamment une conférence Tedx « L’innovation numérique au service des classiques »), et suis enfin devenue blogueuse (www.untexteunjour.fr) » se réjouit Sarah.
Un beau roman, une belle histoire pour cette passionnée qui œuvre chaque jour pour prouver à ses élèves que les mots calment les maux. « Un livre sera toujours là pour vous » aime dire Sarah à son jeune auditoire. Pour cause, c’est bien la lecture qui a accompagné la bibliophile lors de sérieux soucis de santé à l’adolescence. Aujourd’hui en classe, Sarah se sent à sa « juste place et utile » selon ses propres mots. Elle aime instiguer le déclic qui fait résonner dans l’esprit de ses étudiants, la prose d’un grand classique avec les questionnements intemporels. « Le fait qu’une œuvre ait traversé les siècles ne constitue plus un argument suffisant pour qu’un adolescent s’y plonge. Il faut passer par d’autres ressorts, ne pas hésiter à faire des rapprochements entre cultures classique et populaire, leur montrer que les artistes d’aujourd’hui s’inspirent de la culture classique, comme lorsque la chanson Sympathy for the Devil des Rolling Stones est une référence au Maître et Marguerite. » s’amuse Sarah.
Elle rappelle aussi que charité bien ordonnée commence par soi-même : « La meilleure façon de convaincre un ado de lire, c’est de lire soi-même. Combien de parents disent être navrés que leurs enfants ne lisent pas, alors qu’eux-mêmes ne lisent jamais ! Lire avec eux ou à côté d’eux, les faire parler de leurs lectures, les emmener à la librairie ou à la bibliothèque, ritualiser des temps de lecture, même courts mais réguliers, en éteignant les portables, peuvent constituer des solutions. L’outil numérique ne me semble en aucun cas indispensable ni même nécessairement efficace. Rien ne vaut l’éducation par l’exemple. »
De la lecture à l’écriture, il n’y a qu’un court chapitre et Sarah l’a terminé. Elle a publié La première fois que Bérénice vit Aurélien, elle le trouva franchement con, publié aux éditions Eyrolles en janvier 2017. Un ouvrage qui dépoussière les classiques de la littérature amoureuse. « Qu’il s’agisse d’enseigner, d’écrire, d’animer une communauté digitale ou de faire connaître des applications, mon travail tourne autour d’un même objectif : celui de donner envie de lire des classiques, quitte à les bousculer un peu… »
La démarche de Sarah Sauquet est à retrouver dans LES CONFETTIS n°3, toujours disponible.
Photo : Nicolas Auproux
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