Talents

Siham Jibril, créatrice du podcast Génération XX

Siham Jibril donne de la voix aux femmes. Après 1 an aux manettes du podcast Génération XX dans lequel elle interviewe des entrepreneuses, elle revient sur cette incroyable aventure.

Le 12 mars 2018

Bonjour Siham. Quel est ton parcours professionnel ?
J’ai étudié à l’EMLYON, avec l’envie de travailler dans le cinéma et les médias. Une expérience dans le cinéma mais côté finance m’a fait prendre conscience que si je m’investissais dans ce secteur, je préférerais être du côté de la création, dans l’écriture de scénario par exemple. Puis rien à voir avec le ciné et les médias, mon 1er CDI a été dans le e-commerce. J’avais envie d’une expérience complètement différente et j’ai été servie ! Je travaillais entre la France et le Nigéria pour l’équivalent d’Amazon en Afrique. Après une année intensive dans ce job, je suis partie à la recherche de nouvelles aventures. J’ai d’abord pensé à monter une boîte avec une ancienne collègue (alors que ça n’était pas du tout mon plan à la base, je partais pour chercher un nouveau job) et puis au final, je ne me suis pas associée et je me suis retrouvée à créer Génération XX, le podcast dont j’avais « besoin » à ce moment-là.

Qu’est ce que cela signifie pour toi « entreprendre » ?
Pour moi c’est un état d’esprit, c’est l’envie de mener à bien des projets, qu’ils soient d’entreprise, associatifs, créatifs, à plein temps, sur ses heures de loisir ou au sein de son boulot. C’est avoir des idées, y croire, tenter des choses, se planter, réessayer, questionner l’ordre établi et se dire que tout est possible.

Pourquoi t’être lancée dans l’aventure du « podcast » ?
Comme je le disais, Génération XX c’est le podcast dont j’avais besoin à un moment où j’allais peut-être monter une boîte et où je ne savais pas exactement de quoi allait être fait mon avenir professionnel. J’avais besoin d’entendre d’autres personnes, et des femmes pour une question assez simple d’identification, parler de leur parcours avec sincérité et savoir que c’était normal de ne pas toujours savoir où on va. C’est en écoutant des podcasts américains que j’ai eu la « révélation » pour ce format : facile à écouter, du contenu long qui va en profondeur et puis c’est fou comme le fait de n’entendre que la voix de quelqu’un créé ce sentiment de proximité. J’ai tellement adoré ce format que je me suis dit que j’allais en lancer un en français car il n’y avais pas vraiment d’offre sur ce sujet à ce moment là (on était en juin 2016). – Même date de sortie que la revue Les Confettis

Quelles sont les ambitions de Génération XX ?
Partager des bonnes ondes, montrer que chacun.e définit à sa manière le succès, l’ambition, la réussite et tous ces mots sur lesquels on a plaqué des définitions dans lesquelles beaucoup ne se reconnaissent pas, mettre en valeur la diversité des parcours et faire valoir qu’il n’y a pas de « parcours type », chacun.e a son parcours de vie, avec ses hauts et ses bas, ses rêves, ses ambitions et qu’on peut apprendre et se retrouver dans des parcours très différents des nôtres. Ces idées je souhaite les véhiculer à travers le podcast bien sûr, mais aussi d’autres contenus à venir comme une web-série documentaire actuellement en préparation.

Après avoir interrogé de nombreuses femmes, cite-nous une anecdote ou un truc fou dont tu te souviennes ?
Le truc fou c’est quand les invitées viennent chez moi pour l’enregistrement, tout d’un coup il y a deux mondes qui se rencontrent, c’est très différent de lorsque je me déplace chez elles ou à leurs bureaux. La dernière fois par exemple Coline est venue chez moi pour enregistrer et ça m’a fait tout drôle parce que Coline, j’ai l’habitude de la voir dans ses vidéos Youtube sur mon écran d’ordi, pas dans ma cuisine. Pareil, il y a quelques jours je voyais passer des images de la créatrice de mode Christine Phung qui saluait après le défilé de sa collection pour Léonard lors de la Fashion Week à Paris et je me suis dit « c’est fou, il y a un mois on était autour de ma table de cuisine et on buvait du thé tranquillement ». 

Le conseil qui t’a le plus marqué ?
« Commencer par le commencement », c’est Pr. Francine Leca qui m’a dit ça : on a parfois l’impression d’avoir une montagne devant soi quand on commence un projet et la meilleure chose à faire c’est de commencer par des petites choses. Pour remettre cette phrase dans son contexte, je demandais à Francine Leca (qui permet, grâce à l’association qu’elle a créée (Mécénat Chirurgie Cardiaque) de faire opérer en France des enfants atteints de malformations cardiaques qui n’auraient pas pu se faire soigner dans leur pays) par où on commence quand la tâche est si grande (dans ce cas : soigner les enfants atteints de malformations cardiaques dans le monde) et elle m’a répondu : « On commence par un enfant, on lève des fonds pour le faire soigner lui, on lui trouve une famille d’accueil parmi nos amis et puis on recommence pour un autre, et puis un autre… » Voilà, je trouve ça puissant comme conseil.

Le fait de ne pas avoir eu de formation dans les « médias » a-t-il été un obstacle ?
Non, au contraire, cela m’a donné une certaine naïveté qui m’a poussée à me lancer sans me poser de questions. J’ai enregistré mes premiers épisodes avec un micro que l’on m’avait prêté, dans des lieux bruyants et sans faire attention à mes tics de langage… J’ai beaucoup appris de ces premiers enregistrements et j’ai ajusté ma façon de mener les conversations au fil du temps. Je ne me suis pas fait une montage (on y revient) de ce qu’il fallait faire avant de le faire (ce qui aurait peut-être été le cas si j’avais une formation dans les médias, j’aurais tout de suite voulu un son parfait, du matériel pro etc.). Ce qui m’a été utile, c’est d’être curieuse et de regarder beaucoup de tutos sur internet (notamment sur comment faire le montage etc.)

Tu fais partie d’une jeune génération de podcasteuses, pourquoi cette forme de média est-elle en train d’exploser selon toi ? Serait-on en train de délaisser l’image pour le son ?
Je pense que le podcast correspond exactement à la « schizophrénie » de notre époque : on a envie d’avoir accès à du contenu long, à de la profondeur, mais on n’a pas non plus des heures à y consacrer et du coup le podcast est parfait pour ça. On peut écouter un contenu très détaillé sur un sujet pendant 40 minutes tout en faisant autre chose comme prendre les transports, cuisiner, faire du sport etc. En revanche je ne pense pas qu’on délaisse l’image pour le son. Les deux formats cohabitent et la vidéo reste un format incroyable. Le son apporte peut-être de la complémentarité, des contenus différents. Pas question de traiter les choses de la même façon avec le son et l’image, chaque format a ses spécificités.

Pourquoi avoir choisi de mettre en avant des femmes et non des hommes ?
La 1ère raison est assez simple : en tant que femme, je m’identifiais plus naturellement à des parcours de femme. La deuxième raison c’est que je n’étais pas forcément satisfaite de l’image qu’on donnait des femmes qui entreprennent. Il y avait d’un côté wonder woman a qui tout réussi et dans laquelle on ne peut pas s’identifier. De l’autre côté, on nous rabâche que tout était plus compliqué pour les femmes, qu’elles n’ont pas assez confiances en elles, que c’est plus dur pour elles de financer leurs projets et que c’est impossible d’avoir une vie pro et une vie perso. Ça m’a donné plus envie de croire en soi. Du coup, l’idée avec Génération XX, c’est de montrer plein de femmes aux parcours, aux âges et aux ambitions différentes et d’en finir avec le modèle unique de la wonder woman ou du woman-bashing (pas sûre que l’expression existe mais vous voyez l’idée!!)

Les femmes qui sont mises à l’honneur dans ton émission ont-elles des points en commun ? Des traits de caractère communs ?
Oui, elles ont en commun d’avoir de l’énergie, de l’ambition (qu’elles définissent chacune différemment mais en tout cas elles sont motivées par quelque chose), de la détermination, de l’humilité et elles travaillent toutes beaucoup pour mener à bien leurs projets.

Y a-t-il des femmes que tu rêves d’interviewer ?
J’espère que je ne les connais pas encore, c’est chouette d’être surprise par un parcours, une histoire, quelqu’un qu’on ne connait pas encore.

Quelles revendications ont les femmes entrepreneuses ? Quels sont les progrès qu’il reste à faire en terme d’égalité homme-femme dans l’entreprise ?
C’est difficile de répondre à cette question car dans mon podcast j’interroge des femmes entrepreneures (au sens large d’entreprendre encore une fois) en tant qu’entrepreneures et j’essaye au maximum de ne pas biaiser et genrer mes questions pour ne pas enfermer les invitées dans le prisme de « en tant que femme … » En tout cas je pense que là où il y a des progrès à faire c’est dans la représentation. Il faut valoriser différents parcours, redéfinir les notions de « succès » et « d’ambition », ne pas juger les domaines dans lesquels des femmes choisissent d’entreprendre (ex : mode et beauté, j’ai déjà entendu quelqu’un me dire «  oh les femmes n’entreprennent que dans ce domaine ». C’est tellement condescendant ! Laissons les femmes libres de leur parcours et de leurs choix. Ensuite en terme d’égalité homme-femme dans l’entreprise, vaste sujet, encore une fois je pense qu’il y a une question de représentation, il faut arrêter de stigmatiser les femmes qui ont des postes à responsabilité et de leur coller (ou de se coller quand on y est) une image froide ou très Le Diable s’habille en Prada ou femme qui sacrifie tout pour « y arriver », il faut aussi arrêter de genrer certains débats (ex : l’ajustement vie pro vie perso n’est pas une question qui ne concerne que les femmes, elle concerne tout autant les hommes et ils doivent prendre part au débat). Il y a encore des tas d’exemples bien sûr.

Quelles sont les valeurs que tu souhaites transmettre par l’intermédiaire de Génération XX ?
Allez je vais en choisir deux : la curiosité (aller au delà de ce qu’on a, de ce qu’on nous donne, se laisser surprendre, s’intéresser aux autres) et l’empathie (se mettre à la place des autres, comprendre des chemins de vie, des choix de vie, ça amène forcément plus de bienveillance)

Génération XX tee

T-shirt PATiNE x Génération XX en édition limitée

Quel est ton mantra au quotidien ?
Je me dis que tout est possible. Que si j’ai envie de réaliser quelque chose, je peux le faire, j’ai ce qu’il faut, le fameux « YOU GOT THIS! » inscrit sur le tee-shirt que j’ai sorti en collaboration avec la marque PATiNE pour marquer les 1 an de Génération XX. J’y crois vraiment, ça ne tient qu’à nous de faire les choses, de croire en soi, de croire en ses projets, d’aller solliciter les bonnes personnes, de se créer sa chance quoi ! Rien que de l’écrire ça me donne de l’énergie hahaha !!

Nous réserves-tu des surprises en 2018 avec Génération XX ?
A l’occasion de nos 1 an, j’ai aussi organisé un enregistrement public. C’était assez stressant car je ne savais pas si je réussirais à recréer une atmosphère intimiste avec un public et en fait ça s’est super bien passé, on était une vingtaine et pourtant c’était super intime, il y a eu une vraie connexion entre le public et l’invitée c’était chouette donc peut-être que je recommencerai ! Et puis sinon il y a la web-série documentaire que je prépare, j’adorerais que ça sorte en 2018, on verra bien !!

Retrouvez chaque mercredi Siham Jibril dans Génération XX.
L’occasion de découvrir une nouvelle entrepreneuse
www.generationxx.fr